Je revois encore cette fenêtre enveloppée de rouge pourpré sur la place ombragée du Zocalo à Oaxaca, où et il y faisait bon flâner sous les arcades.. Lors de nos longues promenades quotidiennes où nous passions notre temps à refaire le monde avec de grands discours dont nous savions éperdument au fond de nous qu’ils n’auraient aucun écho, Pedro me disait toujours que celui qui oserait jeter, furtivement, ne serait-ce qu’un seul œil au travers de cette fenêtre, subirait les foudres du Dieu Quetzacoatl.
Nous en rigolions souvent, et pourtant la légende du Dieu pesait sur nous encore si fortement à l’aube du 21ème siècle, que nous nous contentions de reluquer les charmes de cette fenêtre sertie d’une épaisse grille en fer forgée depuis l’autre côté de la place, du bistrot du coin, en sirotant de bonnes tasses de chocolat à la vanille et le Mezcal, cet alcool de cactus proche de
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Et, selon les dires de certains, derrière cette vieille fenêtre grillagée vivait un vieillard descendant Aztèque qui, de générations en générations, n’avait d’autre destinée que de protéger et cacher le secret du Dieu Quetzacoatl.
Nous savions, Pedro et moi que cette histoire était notre Histoire, celle d’une princesse gardant le trésor de son époux parti à la guerre, qui avait été attaquée par des voleurs. Refusant alors de leur dévoiler l’endroit où était caché le trésor, les voleurs l’avaient tuée. Son sang se répandit sur le sol d’où poussa une plante, celle-ci donna des fruits qui cachaient un trésor de graines, amères comme les souffrances de l’amour, fortes comme la vertu et rosées comme le sang de la princesse. Nos ancêtres avaient alors reçu cette plante comme un cadeau du Dieu Quetzalcoatl : on l’appela plus tard le cacaoyer.
C’est donc ainsi que depuis des lunes et des lunes, derrière cette belle et majestueuse fenêtre dont s’échappaient parfois d’insondables odeurs amères, était gardé jalousement le secret de fabrication du chocolat..., et que Pedro et moi, comme bien d’autres depuis des générations, ne cherchions pas à détourner, par peur de se voir châtier par le Dieu Quetzacoatl lorsqu’il reviendrait. En effet, les prophéties racontaient que son retour précéderait de peu la fin du cycle du "5ème Soleil", la fin du monde. ...